Ayn Soukhna (Égypte)

Comme les autres ports pharaoniques en mer Rouge connus à ce jour (ouadi el-Jarf, Mersa Gaouasis, tous deux plus au sud), le port d’Ayn Soukhna comprend une série de galeries de stockage creusées dans le piémont montagneux, et un camp pour l’installation des équipes expéditionnaires. Les galeries, au nombre de 10, permettaient d’entreposer le matériel lourd (planches des bateaux, jarres, etc.) entre deux expéditions. Elles étaient donc scellées en fin de mission et réouvertes à la mission suivante, qui pouvait se dérouler parfois plusieurs années plus tard. Le site n’était donc pas occupé de manière permanente, mais uniquement durant les deux ou trois mois que pouvait durer une expédition. La majorité de ces expéditions avaient pour destination la zone minière du Sud-Sinaï, d’où les Égyptiens extrayaient du cuivre, indispensable à la fabrication des armes et des outils, et de la turquoise, utilisée en bijouterie. Un plus petit nombre d’expéditions étaient envoyées pour un voyage au long cours vers le sud de la mer Rouge, au pays de Pount, réputé pour l’encens, la myrrhe et autres produits exotiques. Les vestiges carbonisés de deux embarcations démontées, datant du début de la XIIe dynastie, ont été retrouvés dans deux galeries. Ils ont permis de mieux comprendre les particularités techniques des bateaux de mer égyptiens pour cette période.

Ayn Soukhna est occupé pour la première fois sous le règne du roi Chéphren, durant la IVe dynastie et semble être le seul port égyptien en mer Rouge jusqu’à la fin de l’Ancien Empire. Au début du Moyen Empire, le port est à nouveau utilisé : le site connaît alors, pendant quelques décennies, une occupation plus large qu’à la période précédente, car les équipes égyptiennes y effectuent la réduction du minerai de cuivre provenant du Sinaï. À ce jour (2022), 98 fours de réduction ont été identifiés sur le site, faisant d’Ayn Soukhna un site unique en Égypte pour la connaissance de la métallurgie du cuivre.

La fouille du campement, constitué principalement d’un habitat rapidement construit en pierre sèche, permet d’appréhender la vie quotidienne du personnel des expéditions à l’Ancien Empire et au début du Moyen Empire (couchage, stockage des denrées, production de pain et de bière, activités artisanales diverses).  Elle autorise également une meilleure compréhension de la logistique des expéditions, ainsi que de l’adaptation des hommes à des conditions de vies difficiles et peu habituelles pour les habitants de la vallée du Nil.

 

1. Principal panneau d’inscriptions rupestres commémorant les expéditions égyptiennes sur le site d’Ayn Soukhna (© Mission archéologique d’Ayn Soukhna

2. Entrées des galeries de stockages creusées dans la montagne, dans le ouadi 1 (© Mission archéologique d’Ayn Soukhna)

3. Planches d’un bateau de mer du début du Moyen Empire, démontées et empilées, qui ont brûlé dans la galerie G9 (© Mission archéologique d’Ayn Soukhna)

4. Unités d’habitat et de stockage dans le campement de la zone basse du site (© Mission archéologique d’Ayn Soukhna)

5. Atelier de métallurgie du cuivre datant du début du Moyen Empire dans la zone basse du site : il comprend quatre fours de réduction et un petit four de fusion (© Mission archéologique d’Ayn Soukhna)