Quand les Ottomans firent le point

Histoire graphique, technique et linguistique de la ponctuation turque ottomane

À en croire les spécialistes, le turc ottoman aurait de commun avec l’arabe de n’être doté d’aucun système de ponctuation. Tardive, l’apparition de la ponctuation serait le résultat de la modernisation des Tanzimat (1839-1878) et le produit technologique de l’imprimerie. Sa diffusion serait d’inspiration étrangère et sa généralisation serait liée à l’adoption des caractères latins à l’époque républicaine. L’ouvrage remet en question ces idées reçues, au moyen de l’exploitation d’un vaste corpus de sources manuscrites et imprimées produites du XVe siècle à aujourd’hui. Il identifie des signes de ponctuation au sein d’une variété de mises en forme artistiques (calligraphie, musique) et scientifiques (algèbre, géométrie). Il les repère sur des supports de l’époque impériales (registres administratifs, inscriptions funéraires, chroniques) comme du temps présent (partitions musicales, caricature, bande-dessinée). Il étudie le turc ottoman à la lumière de comparaisons avec des systèmes de ponctuation en usage dans l’empire (judéo-espagnol, turc-arménien, grec et syriaque). Plutôt que d’opposer imprimé et manuscrit, calligraphie et typographie, il les aborde comme formes complémentaires d’une « aventure des écritures ». Au terme d’une enquête originale en histoire ottomane qui croise belles lettres, sciences et arts, l’ouvrage établit les conclusions suivantes : une ponctuation ottomane existait avant l’apparition de l’imprimerie ; son devenir accompagna la transformation de la langue turque ottomane ; hors du seul domaine des langues européennes, les Ottomans eurent une manière bien à eux de faire le point ; la ponctuation est le produit d’une histoire graphique, technique et linguistique riche et complexe ; son étude éclaire le passé des sociétés impériales, le présent de la République turque et le devenir du Moyen-Orient contemporain.

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